Communication et marketing responsable : comment passer à l’action ?

Comment construire une image de marque alignée avec les enjeux sociaux et environnementaux actuels ? Pour les communicants et marketeurs, la transition ne se limite pas à un changement de ton : elle implique de repenser en profondeur les récits que l’on diffuse et les supports que l’on utilise. Voici les deux piliers d’une communication vraiment responsable (spoiler : aucun ne commence par “faire un post LinkedIn sur ses bonnes résolutions 2025”).

Des récits sincères pour inspirer une société plus durable

Pendant des décennies, la communication s’est construite sur des promesses : vendre du rêve, créer du besoin, pousser à consommer. Mais face à l’urgence écologique, ce modèle s’essouffle. Aujourd’hui, les marques les plus inspirantes sont celles qui racontent autre chose. Elles donnent envie de faire différemment. Elles assument leur vulnérabilité. Elles misent sur la pédagogie plus que sur la promesse.

Le rôle des communicants évolue : il ne s’agit plus seulement de faire passer un message, mais de créer des récits qui éveillent la conscience, montrent les chemins du possible, donnent envie de contribuer. Pour cela, l’émotion joue un rôle fondamental. Comme le souligne George Marshall, spécialiste des récits climatiques, “les chiffres nous font comprendre, mais seules les émotions nous font bouger.” Un storytelling responsable ne nie pas les faits, mais les incarne à travers des histoires humaines. Il rend la sobriété désirable, il valorise les héros du quotidien plutôt que les success stories hors sol. Certaines marques montrent la voie. Patagonia, par exemple, a renoncé à la croissance à tout prix pour se consacrer à la protection de la nature. Back Market a fait du reconditionné une alternative crédible et stylée à l’électronique neuve. Veja valorise la transparence à chaque étape de sa production, tout en restant désirable.

Ces marques ne racontent pas qu’un produit. Elles racontent un choix de société. Et elles prouvent qu’on peut vendre des baskets sans faire courir personne torse nu dans le désert.

Le marketing des 6R : une nouvelle boussole

Lors de la Convention des Entreprises pour le Climat (CEC), un nouveau modèle marketing inspiré de l'économie circulaire a été mis en avant : le marketing des 6R. Ce modèle repose sur six piliers :

Schéma marketing mix 6R
  • Rethink - Repenser le rôle des marques

Se demander “à quoi sert ma marque ?” et faire évoluer son positionnement en cohérence. La MAIF s’affiche comme une entreprise à mission et questionne ouvertement son modèle économique dans ses prises de parole. 

  • Respect - Respecter le vivant à travers ses choix de conception

Privilégier des matériaux recyclables, locaux, durables, et réduire les volumes dès la conception. 

Nature & Découvertes intègre systématiquement l’éco-conception dans ses packagings et produits, et ça sans coller une feuille de fougère sur tous ses visuels.

  • Reward - Rémunérer équitablement toutes les parties prenantes

Adopter une politique d’achats responsables, et communiquer dessus avec transparence. 

La marque 1083 affiche clairement les salaires et les coûts de production de ses jeans made in France. Non, produire en France, ça coûte plus que 9,99€ le jean.

  • Reveal - Révéler sincèrement ses pratiques

Ne pas cacher ses zones grises, publier un rapport d’impact, partager les coulisses. 

Loom consacre une partie de son site à expliquer ses arbitrages, ses doutes, et pourquoi elle renonce à certains produits.

  • Reduce - Réduire les impacts (surproduction, surconsommation)

Proposer des services de réparation, de location ou de seconde main au lieu de pousser à l’achat. 

Faguo publie un bilan carbone de chaque produit et incite à “acheter moins” (un message qui donne des sueurs froides à votre ancien prof de marketing), en seconde main ou reconditionné.

  • Rally - Rallier ses publics à la transition

Embarquer ses clients, salariés ou partenaires dans des démarches concrètes (ateliers, défis, formations…). 

Rejoué transforme des jouets inutilisés en vecteurs d’emploi solidaire et de sensibilisation : des jouets pour enfants ET pour adultes responsables.

Ces six leviers ne sont pas des cases à cocher. Ce sont des portes d’entrée pour réinventer en profondeur la façon dont on pense, conçoit et raconte une marque.

Éco-concevoir les supports de communication

Raconter la transition, c’est bien. La mettre en pratique, c’est encore mieux. Et cela commence par les supports eux-mêmes : leur utilité, leur impact, leur cycle de vie. Avant d'afficher son engagement, il est essentiel de mesurer l'impact de ses propres outils de communication. L'Analyse du Cycle de Vie (ACV) ne concerne pas seulement les produits vendus, mais aussi tous les supports utilisés pour communiquer : campagnes digitales, supports papier, événements, publicités télévisées.

Une communication véritablement responsable passe par des choix concrets : alléger les sites web, limiter les vidéos lourdes, réduire les tirages papier, supprimer les goodies inutiles, choisir des encres moins polluantes, mutualiser les stands, concevoir des campagnes “réutilisables”. D'après l'Ademe, 80 % des impacts environnementaux d'un produit sont déterminés dès sa conception. Ce principe s'applique également aux supports de communication : une approche d'écoconception dès la phase de création permet de réduire significativement l'empreinte environnementale des campagnes.

L'écoconception de produits ou services : un prérequis pour communiquer avec crédibilité

Même si l'écoconception des produits et services n’est pas le cœur de cet article, elle reste un prérequis indispensable. Comment communiquer authentiquement sur ses engagements si l’offre n’a pas été transformée en amont ? L’ACV permet d’identifier les leviers d’amélioration et d’ancrer les messages dans des données concrètes, vérifiables, opposables au bullshit.

Une transformation du métier en profondeur

Ce n’est pas un simple virage de com’. C’est un changement de posture. Les communicants ne sont plus seulement des vecteurs d’image : ils deviennent des architectes de transformation. Cela se traduit dans leurs missions, dans leurs indicateurs, dans les compétences qu’ils développent. D’après notre étude “La transition écologique au cœur de chaque métier”, un communicant sur deux anticipe une révision complète de ses KPIs dans les prochaines années. On ne mesurera plus seulement l’audience, mais l’impact. On valorisera la transformation générée, pas uniquement le taux de clics. Les compétences qui montent en puissance sont claires : écoconception, pensée systémique, capacité à faire récit collectif, maîtrise des indicateurs extra-financiers, sens critique. C’est un métier qui se réinvente. Et c’est enthousiasmant.

Nous avons baigné pendant des décennies dans un imaginaire consumériste et techno-solutionniste. Aujourd'hui, il est urgent de proposer de nouveaux récits mettant en avant la sobriété joyeuse et un bien-vivre collectif. Des initiatives comme les micro-learnings permettent de former les communicants et marketeurs aux enjeux de la soutenabilité et aux nouvelles pratiques adaptées à ces défis.

Communicants, marketeurs, prêts à transitionner ? Curieux d'en savoir plus sur l'avenir de la communication et du marketing responsable ? Consultez la fiche de poste prospective dédiée dans l'étude (pages 191 à 208) et découvrez les outils, compétences clés à développer, fiche de poste détaillée, KPIs…

Rédigé par Silvia Basile.

Suivant
Suivant

Le triangle de l'inaction : définir sa zone de responsabilité dans son métier pour dépasser le triangle de l'inaction